Avec Rainier Lericolais, on ne sait jamais sur quel pied danser. Ce jeune trenteniare, résidant parisien, par ailleurs sculpteur et plasticien, a la bonne manie de savoir surprendre son auditeur. A peine a-t-il installé un climat qu'il le court-circuite pour en instaurer un second, et ainsi de suite. L'oreille est toujours alertée, tâchant de comprendre d'où et comment lui proviennent tous ces sons, alambiqués de manière ludique et réfléchie. Si le matériau de base de Reader's Digest est le sample, il est utilisé comme matière première, comme outil de travail, plutôt que comme simple objet de citation maniériste. Rainier pioche aisni des voix (jusqu'à celle de William S. Burroughs), des pianos, trompettes, cordes, percussions, qu'il associe avec ses sons à lui, parfois proches de ceux d'un Alvan Noto en grande forme ou d'un Vert hexagonal, pour se créer son propre univers, diablement original et constamment chargé émotionnellement. Car le disque est véritablement émouvant. Entre des voix aériennes, des sonorités empruntées à Ennio Morricone, des constructions joueuses évoquant un Mouse On Mars minimaliste, Rainier Lericolais parvient à construire une oeuvre où prédomine l'harmonie. Derrière le titre, Reader's Digest, que l'on pourrait entendre comme "les meilleurs extraits de mes références musicales", on retiendra surtout qu'il s'agit d'un florilège de perles électroniques, entêtantes et indispensables dès leur première écoute. (F.Ma.) / Octopus 21 / Avril 2003